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WONDER MOTHER : J’AI SURVÉCU À L’ADAPTATION (OU PRESQUE)

06 Octobre 2015

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D’habitude, vous êtes une personne plutôt normale. Bon, vous avez vos défauts, voire un petit grain de folie, mais globalement, les gens disent de vous que vous êtes quelqu’un de stable, détendu et solide.

Ça, c’est clairement parce que les gens ne vous ont pas croisée lors de l’Adaptation de votre bébé. Là, vous ressembliez plutôt à une junkie psychopathe au bord de l’internement.

Souvenez-vous, l’Adaptation ! Ce mot barbare, étrange, dont seuls les parents saisissent toute la gravité : la première semaine où votre enfant est gardé par quelqu’un d’autre que vous, en crèche ou par une nounou.

Ça n’a l’air de rien comme ça. En plus, vous vous étiez bien préparée. Vous aviez super potassé le sujet : “Ces jours d’Adaptation, aux horaires et étapes très progressifs, apprennent en douceur à votre enfant à vivre sans vous”, disaient doctement les livres. Mais ouais. Fastoche. Votre lapin allait assurer.

Seulement, ce que les livres ne disaient pas, c’est qu’en réalité, l’Adaptation n’est pas seulement (pas du tout…?) destinée aux enfants. Mais cela, vous ne l’aviez réalisé qu’au quatrième jour, quand votre bébé restait là-bas une journée presque entière. Lorsque vous tourniez en boucle dans le périmètre de la crèche, le plexus en nœud de chaise, le cœur plié en douze façon origami, l’eye-liner en vrac, et un million de questions vitales tourbillonnant dans votre tête (“Ai-je pensé à leur dire que Victor aime qu’on lui chante “Petit Escargot” quand il fait popo ?”). À un moment, le cœur battant, les mains tremblantes, quasi nauséeuse, ressemblant trait pour trait à une camée en manque (ce que vous étiez, en fait, l’odeur du crâne de votre bébé étant une drogue surpuissante – c’est pas moi qui le dit, ce sont des études scientifiques très sérieuses), paniquée à l’idée qu’il soit en train d’hurler, abandonné, vous étiez à deux doigts de lancer une fausse alerte à incendie pour faire évacuer le bâtiment.

La suite, ami parent, vous la connaissez.

Bien entendu, quand vous étiez allée le chercher, votre trésor souriait paisiblement à sa nounou en secouant un petit jouet. “Oh, vous avait dit la dame, il a bien un peu pleuré à votre départ (… comment ça, un peu ?), vaguement râlé au moment du coucher le temps de prendre ses repères (… comment ça, vaguement ??), mais globalement, tout s’est bien passé, il devrait vite se sentir ici comme chez lui”.

Vous en étiez restée comme deux ronds de flan. En gros, pendant que vous souffriez mille morts, la chair de votre chair avait passé l’étape en douceur, même pas mal maman, ça va très bien, merci.

On vous avait rendu votre gentil bébé aux joues roses, à vous la dingo échevelée aux cernes tachés de mascara salé. Vous l’aviez respiré goulûment. Vous vous étiez souris avec passion. Et le lendemain, vous aviez été très courageuse, et n’aviez (presque) pas pleuré.

En tous cas, c’est comme ça que ça s’est passé pour moi il y a quelques années. Et figurez-vous que cette semaine, c’est au tour de mon deuxième enfant de faire son Adaptation. Bien sûr, ces derniers jours, je me disais : “Ha ha, je ne suis plus une bleue, je connais, je vais gérer ça les doigts dans le nez”. Ahem. À vous, je peux bien le dire : malgré l’agréable sensation de liberté retrouvée, j’ai tout autant que pour son grand frère les yeux qui piquent, l’estomac noué, le cœur qui bat fort et un manque sévère de l’odeur de son petit crâne.

L’Adaptation, vous le savez maintenant, est bien évidemment SURTOUT destinée aux parents !

Sur ce, je vous laisse, c’est enfin l’heure où j’ai le droit d’aller chercher mon bébé adoré à la crèche.

Et, bien sûr, de sniffer ses cheveux.